En février 1994, Sylvain célébrait ses 30 années de carrière avec un 10e album enregistré devant public: Qu’est-ce qu’on a fait de nos rêves? Cette dernière offrande musicale allait plusieurs mois plus tard permettre au poète de remporter un premier Félix du meilleur auteur-compositeur de l’année. Une récompense ovationnée par toute l’assistance du Théâtre Saint-Denis où se tenait le gala de l’ADISQ à l’automne 1994. Pour l’heure, le lancement de son dernier opus se déroulait à la Butte Saint-Jacques dans le Vieux-Montréal, là où Sylvain projetait de donner une série de spectacles avec ses complices Vic Angelillo et Gérard Masse. Plusieurs amis et artistes étaient présents à cette occasion, dont Gilles Vigneault, pour saluer l’œuvre de Sylvain au cours des 30 années écoulées depuis son premier prix remporté dans le cadre du Concours international Chanson sur mesure de la Communauté radiophonique de langue française.
Éric Lelièvre
Thierry Larose: C’était un de nos grands!
Invité à participer à l’hommage sur Sylvain Lelièvre, le jeune auteur-compositeur Thierry Larose se dit honoré d’interpréter les chansons du poète: «J’aimerais montrer aux gens que c’était un de nos grands», s’est-il confié au Journal de Montréal. Dans le spectacle Qu’est-ce qu’on a fait de nos rêves, Thierry Larose a choisi deux de ses chansons favorites du répertoire Lelièvre, à savoir Le drop out et La banlieue; il considère cette dernière comme une des meilleures au monde – «c’est une des chansons les mieux écrites que je n’ai jamais entendues.» Thierry exécute aussi plusieurs duos avec ses compagnons de scène Florence K, Martin Théberge et Joe Bocan, qui signe la mise en scène, dans une orchestration musicale dirigée par Jean Fernand Girard. Ensemble, les interprètes parcourent les plus grands classiques du catalogue: Lettre de Toronto, Moman est là, Old Orchard, Petit matin et finalement Marie-Hélène. La tournée en cours à travers la province est encore à l’affiche à Saguenay (28 février), Saint-Jean-sur-Richelieu (2 mars) et Rimouski (14 mars).
Infos sur la tournée : Productions Martin Leclerc
La basse-ville intemporelle
Dans sa chronique du Soleil, le 30 décembre dernier, le journaliste François Bourque a évoqué la chanson La basse-ville comme un des critères du mystère de l’ADN de Québec. Citant les deux premiers vers du refrain Quand on est de la Basse-Ville, on n’est pas de la Haute-Ville, le chroniqueur rappelle que Sylvain Lelièvre avait bien saisi «la dualité physique et sociale de Québec. Une ville haute du pouvoir, de la petite bourgeoisie et des privilèges. La ville basse des quartiers ouvriers et de la vie ordinaire, entre les hangars de tôle pis les sacs à poubelle». De son côté et de manière similaire, l’ancien maire de Québec, Régis Labaume a aussi emprunté ces paroles pour appuyer ses propos dans une chronique de La Presse avant les élections 2022: «Si, à Montréal, il y avait l’Ouest et l’Est, la topographie de Québec, elle, séparait nettement deux milieux de vie inégaux : la haute et la basse ville. Sylvain Lelièvre a résumé mélancoliquement cette distinction en chantant : Quand on est d’la basse ville, on est pas de la haute ville.» Pareillement, Claude Villeneuve, à l’époque de ses chroniques au Journal de Québec, s’est aussi inspiré du refrain de La basse-ville dans Mon village en ville pour représenter son quartier d’adoption, Limoilou: «Dans mon quartier, on a un poète national. Il s’agit du regretté Sylvain Lelièvre, le barde de Limoilou. Je suis d’une ruelle comme on est d’un village, disait dans sa chanson La basse-ville celui qui avait connu les grandes familles d’avant Vatican II.» Cette pièce-phare a également fait l’objet d’un portrait à Télé-Québec, dans le cadre de l’émission L’espace d’une chanson diffusée en 2015. Le reflet du clivage bourgeois et ouvrier y est abondamment illustré sur le plan historique et social.
Chanson La basse-ville
Normand de Bellefeuille retrouve Sylvain
Grand ami de Sylvain, le poète, essayiste et romancier Normand de Bellefeuille s’est éteint le lundi 8 janvier dernier. D’abord confrères au Collège de Maisonneuve au département de Littérature, les deux enseignants se sont liés d’amitié au début des années 1990. Leur lien n’a eu de cesse de se consolider jusqu’à collaborer ensemble sur deux chansons: Les enfants de Lascaux et Chez Dagenais. Cette dernière est un véritable clin d’œil à leur réunions départementales autour d’un «bock ou deux», où ils refaisaient le monde tous les deux. Travaillant à un deuxième roman, après son succès de librairie Le troisième orchestre, Sylvain consultait régulièrement Normand de Bellefeuille pour des conseils d’écriture. Celui-ci a été profondément attristé par le départ trop hâtif de son ami musicien au printemps 2002. À la suite de quoi, il a poursuivi sa riche création littéraire et poétique jusqu’à remporter en 2017 le prix Athanase-David (Prix du Québec).
Chroniques de Denys Lelièvre sur Sylvain
À invitation de la station CION FM de Québec et de l’animatrice Dany Bentz, Denys Lelièvre a offert 12 chroniques dédiées à son frère, Sylvain. Intitulée Je flâne en chemin, cette série de capsules audios d’une dizaine de minutes chacune amène l’auditeur dans un voyage captivant au cœur de la création de Sylvain Lelièvre, depuis ses racines dans Limoilou jusqu’à son départ prématuré en 2002: une fascinante exploration de l’œuvre chansonnière et musicale de l’auteur-compositeur. À partir du fil conducteur «Le chanteur libre», Denys Lelièvre plonge dans les profondeurs des influences littéraires, poétiques et musicales qui ont forgé l’essence même de l’artiste, jusqu’à l’évolution de son style assumé de jazzman des dernières années. Grâce à l’aimable autorisation de la chaîne radiophonique Radio-Galilée, les 12 chroniques ci-dessous sont disponibles à l’écoute. Elles offrent une immersion inédite dans l’œuvre de Sylvain Lelièvre: un régal pour les passionnés de sa musique et de son héritage culturel.